L'argent roi

Dernièrement, sur un plateau de télévision, un homme politique en vue :

– Si les autres pays mettent l’argent au premier plan, c’est leur affaire. Mais je ne veux pas, moi, d’une France où on mesurerait la réussite au compte en banque. Je connais des gens « pauvres » qui ont parfaitement réussi leur vie...

Ce propos (que je retranscris de mémoire), qui aurait mérité une salve d’applaudissements, a jeté au contraire un froid sur le plateau. Il prenait manifestement le public à rebrousse-poil, le heurtait dans ses convictions. Ce public, même s'il souffrait de la royauté de l’argent, redoutait vraisemblablement sa… destitution.

Mais comment, pourquoi peut-on vouloir que l’argent soit roi ? Quel avantage peut-on trouver à sa… monarchie ?

Un avantage certain : il suffit pour remplir sa vie de se remplir les poches. Le seul manque à combler est le manque d’argent. Tous les problèmes existentiels se ramènent à un seul, le plus sommaire par surcroît : le problème financier. Une seule chose à faire : du fric. Quoi de plus simple ? Un rêve pour les gens… simples (d’esprit), qui rêvent, et pour cause, de facilité.

Ce n’est pas l’élite qui a mis l’argent sur le trône, c’est le peuple, ou plutôt la masse, c'est-à-dire le peuple livré à lui-même, à sa pente. Ce n’est pas un hasard si l’argent ne régnait pas au temps des rois : son royaume est advenu avec la démocratie (mal comprise).

L’idée que l’argent fait le bonheur plaît à tout le monde, aux riches comme aux pauvres. Aux riches, parce qu’elle les flatte ; aux pauvres parce qu’elle excuse la pauvreté de leur vie : comment ma vie ne serait-elle pas pauvre, puisque je n’ai pas d’argent et que la richesse de la vie est proportionnelle au pouvoir d’achat ?

Ce n’est pas la force des choses qui a mis l’argent sur le trône : c’est la faiblesse, la paresse, des hommes.