Poésie & vulgarisation
Peu de poètes contemporains mourraient, à l'instar de Rainer Maria Rilke, s'il leur était défendu d'écrire. C'est pourquoi la poésie se meurt.
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Pour la plupart des poétisants que j'ai pu côtoyer, la poésie est un "plaisir", c'est-à-dire exactement le contraire d'une contrainte. L'idée même qu'ils puissent être contraints d'écrire, fût-ce de l'intérieur, les... épouvante. Liberté, pour eux, rime avec gratuité, au sens d'absence de nécessité, de raison, de sens. Liberté, pour eux, signifie absurdité. Je veux croire qu'il existe de véritables poètes en herbe, ou en épi, mais ils semblent aussi rares que les hommes quand Diogène en cherchait un en plein jour, sa torche allumée à la main. Les animaux sauvages, c'est-à-dire libres, sont bien menacés d'extinction : pourquoi les poètes, ces hommes libres par excellence, seraient-ils épargnés par le grand nivellement ?
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Il y a malheureusement une limite à la "vulgarisation". Il y a des choses qui, tout simplement, ne s'adressent pas à tout le monde et dont, du reste, la plupart n'ont rien à f... aire. Ou alors il leur faut une version... allégée, qui est autre chose. C'est une idée perverse que celle selon laquelle il faudrait être compris par tout le monde : elle a entraîné l'aplatissement, c'est-à-dire l'effondrement, de la culture (médiatisée, en tout cas). On ne peut et on ne doit pas être compris par tout le monde, sauf à faire de la bouillie pour chat !